Cette peinture « Saules coupés au coucher du soleil » a parfois été surnommée Le verger en feu de Van Gogh. Même si l’intention du peintre est de nous faire voir le feu du soleil couchant, les couleurs de ce tableau sont si vives qu’elles peuvent tout aussi bien dépeindre le frère feu du Cantique du Soleil : « Loué sois-tu, mon Seigneur, par frère Feu, par lequel tu nous illumines la nuit ; et lui est beau et joyeux et robuste et fort. »
Pour nous aujourd’hui, c’est presque seulement à l’occasion des rassemblements autour d’un feu de camp ou au chalet près du foyer qu’il nous est possible d’admirer la beauté de frère Feu mais qu’en était-il au temps de saint François ?
Pensons à la première communauté franciscaine en train de reconstruire la chapelle de la Portioncule, située près de la grande et épaisse forêt dans la campagne d’Assise. Les frères vivaient dans de petites cabanes et pour eux voir le feu était chose quotidienne du fait que les repas étaient cuits sur le feu de camp.
François d’Assise avait une grande admiration pour frère Feu : ‘Le soir, à la tombée de la nuit, tout homme devrait louer Dieu pour cette créature qu’est frère Feu…’ Et il ajoutait: ‘Nous sommes tous comme des aveugles, et c’est par cette créature que le Seigneur éclaire nos yeux, durant la nuit’.
Nous savons par le frère Léon, compagnon de François, que celui-ci avait une extraordinaire révérence pour le feu, au point qu’une fois il ne voulut pas éteindre l’incendie qui ravageait sa cellule et se fit grief d’avoir sauvé une pelisse dont, par avarice, il avait ainsi privé ‘frère Feu’.
Il n’y a pas de doute que le feu a parlé au cœur de François. « Nous connaissons, écrit Éloi Leclerc, l’expérience affective profonde de François de cet amour singulier qu’il portait au feu, et l’image séduisante et idéalisée qu’il s’en faisait. Le feu qu’il aimait et imaginait, était un feu dont il n’avait plus rien à craindre, un feu dont toute violence s’était métamorphosée en une force invincible de lumière. Ce feu n’avait plus rien de terrifiant ou d’angoissant. C’était un feu ‘beau et joyeux et robuste et fort qui éclaire la nuit’ : un feu fraternel. »
Une image de ce feu fraternel se trouve dans la légende franciscaine évoquant un feu mystérieux au couvent de la Portioncule : « Un jour, François avait cru devoir répondre au désir de sœur Claire, alors recluse à Saint-Damien, en l’invitant à manger avec lui et ses frères à Sainte-Marie-des-Anges. Nous savons comment, selon les Fioretti, « au premier mets, saint François commença à parler de Dieu avec tant de suavité qu’ils furent tous ravis en Dieu. Et pendant qu’ils étaient ainsi, ravis, les yeux et les mains levés au ciel, les gens d’Assise et des environs voyaient que Sainte-Marie-des-Anges et tout le couvent et le bois qui était alors à côté du couvent, étaient en train de brûler complètement… coururent là en grande hâte pour éteindre le feu. Mais arrivés au couvent et voyant que rien ne brûlait, ils y pénétrèrent et trouvèrent saint François avec sainte Claire et tous leurs compagnons ravis en Dieu dans la contemplation, et assis autour de cette humble table. D’où ils comprirent avec certitude que c’était là un feu divin ».
Et vous, le feu et chaleur, bénissez le Seigneur :
À lui, haute gloire, louange éternelle !
Georges Morin, ofm