Les franciscains de Montréal déménagent, et lorsque j’ai entendu pour la première fois notre nouvelle adresse, rue Lescarbot, je me suis demandé pourquoi elle me semblait familière. Ça m’a d’abord fait penser à l’escargot. Mais l’escarbot est autre chose; il s’agit d’un petit coléoptère. Jean de La Fontaine en a fait le personnage d’une de ses fables, intitulée L’aigle et l’escarbot. Il y raconte comment l’humble escarbot se met en colère contre l’aigle qui n’a pas eu pitié de son ami, le lièvre. L’escarbot se venge, et l’aigle doit alors trouver un moyen de s’entendre à nouveau avec lui.
Est-ce là un début prometteur pour les franciscains de Montréal qui emménagent dans leur nouvelle résidence? Je pense que oui. La morale de cette histoire, c’est que la petitesse n’empêche pas de se porter à la défense des droits des plus faibles. Tout le monde a remarqué les changements vécus par l’Église au cours des 50 dernières années, alors que la messe dominicale et les activités paroissiales ne sont plus au centre de la vie de la plupart des gens. On nous a maintenant confié un rôle beaucoup plus restreint. Si les fondements de la foi – l’amour de Dieu et l’amour du prochain – restent largement populaires, la religion organisée est certainement dans un état de grandes transformations. Une fois de plus, nous devons nous adapter aux circonstances changeantes, car le message chrétien a sans cesse besoin d’être communiqué à nouveau pour que nous puissions trouver un sens à toute cette évolution.
En tant que franciscains, cela ne devrait pas nous faire peur. Si notre ministère dans les paroisses a été important dans le passé et continue de l’être aujourd’hui, il n’a jamais été notre ministère le plus important. Notre principal ministère consiste à former de petites communautés de foi chrétienne catholique qui peuvent témoigner de l’espérance que leur donne la foi au cœur de leur quotidien.
Si j’essaie d’adapter la fable L’aigle et l’escarbot à notre situation, je crois que nous pouvons nous reconnaître dans l’escarbot. Celui-ci se tient tout près du sol, le plus souvent caché, hors de la vue des puissants, mais attentif à ce qui se passe près de lui. Lorsque nous enracinons la vie chrétienne dans l’ordinaire de la vie communautaire, au milieu des gens, alors nous nous trouvons là où nous sommes censés être. L’aigle représente les puissants, qui n’ont peut-être pas encore appris l’importance de faire preuve de miséricorde et de prévenance envers ceux et celles qui ont besoin de protection.
Alors, je me suis dit, voici notre nouveau nom : « Les escarbots franciscains ». Nous déménageons dans une nouvelle résidence, mais nous avons la chance de renouer avec la vie des gens aux côtés desquels nous continuerons à vivre. Nous restons au milieu des fidèles chrétiens qui cherchent dans notre service et notre prédication une façon de nourrir leur foi.