Inspiration et découverte, d’une couverture à l’autre
À mon grand bonheur, on m’offre la chance de me présenter et de vous informer sur la nature de mes fonctions extraordinaires au couvent de Rosemont. Je m’appelle Maxime Laprade, je suis candidat à la maîtrise en histoire du Moyen Âge à l’Université du Québec à Montréal. Depuis l’automne 2018, je suis le préposé aux livres rares de la bibliothèque provinciale, au couvent de Rosemont (Montréal).
D’abord, je dois dire que la bibliothèque contient un nombre imposant (des milliers!) de publications en tout genre, ce qui inclue de nombreux exemplaires en double, d’où l’important travail d’élagage. J’assiste dans ses tâches le père Pierre Brunette, ofm, chargé de la gestion du patrimoine livresque franciscain. Le prédécesseur du père Brunette, feu père Laurent Gallant, ofm, rêvait d’organiser la bibliothèque afin de mettre en valeur le riche fond d’ouvrages franciscains, anciens et modernes.
Sur la base de son travail colossal, substantiellement augmenté par les efforts du dynamique frère Lucien Abalo, ofm, étudiant en bibliothéconomie à l’Université de Montréal, nous tentons humblement de bâtir une bibliothèque de franciscana qui soit la plus exhaustive possible.
La bibliothèque contient des livres et périodiques anciens et plus modernes. Beaucoup d’ouvrages de référence ou de monographies abordent des sujets comme l’histoire, la théologie, la philosophie, la sociologie (et autres). Certains sont très rares ou très anciens. La majorité des ouvrages datés du XIXe siècle et avant entrent dans les catégories susmentionnées. Les livres anciens sont toutefois subdivisés d’une manière différente, c’est-à-dire selon le format, l’âge et la condition physique. Par exemple, les incunables sont des imprimés datés d’avant 1500. Les post-incunables datent de 1500 à 1530. Le terminus ante quem pour les livres « anciens » est généralement 1830. La bibliothèque est aussi responsable de manuscrits importants datés du XVe au XIXe siècle, conservés au couvent en un lieu sécuritaire et tempéré.
De plus, le père Brunette et moi encadrons les efforts d’une équipe de l’Université du Québec à Trois-Rivières affiliée à un projet de catalogage. En effet, trois jeunes doctorants et leur superviseur travaillent en temps normal avec nous afin d’ajouter les ouvrages les plus vieux à une base de données en ligne. La bibliothèque poursuit aussi l’élagage de ses titres rares à contenu non franciscain, initié par le père Gallant, qui sont mis en vente au profit de la bibliothèque par l’entremise d’un libraire spécialisé.
Dès mon arrivée au milieu des rayons, j’ai découvert un lieu contenant des trésors uniques. Au-delà des livres, de la spiritualité ou de l’histoire qu’ils contiennent, j’ai croisé sur les tablettes de célèbres franciscains du passé. J’ai en tête les ex libris de savants éminents, les dédicaces respectueuses entre collègues ou celles plus chaleureuses entre des amis de longue date. Les vœux et les notes, rédigées en de nombreuses langues, renferment en eux-mêmes des fragments de l’histoire de chaque individu. Une bibliothèque, c’est un rassemblement de grandes idées, mais aussi un lieu de rencontre intemporel avec d’autres, en soi-même. Dans une bibliothèque, on n’est jamais vraiment seul.
De la bibliothèque, située tout près de l’église, j’entends parfois le son réconfortant d’un orgue, ou celui de la vie de prière qui suit son cours. La compagnie des autres est une richesse en soi. Les frères de Rosemont, avec qui je ne me lasse jamais d’interagir, ont partagé avec moi leur maison, leur table, mais aussi de nombreuses histoires de leur vie en tant que prêtres ou en tant que piliers de communautés à travers le monde. J’ai pu y rencontrer des missionnaires pionniers, des érudits de renom et des frères qui brillent par la force de leur passion et de leur foi.
Au réfectoire, comme au milieu des livres, j’ai donc lentement pu grappiller quelques bribes d’expériences franciscaines, pour alimenter, faire croître ma propre vie intérieure. L’atmosphère de sérénité qui règne sur les lieux, la bienveillance des frères et leur accueil toujours renouvelé sont et resteront toujours pour moi les marques d’une charité profondément inspirante. Elles sont pour moi la preuve d’une humanité qui vit pleinement sa confiance en Lui.
Maxime Laprade