Pierre Ducharme, OFM
« J’invite ceux qui ont pris part à la Rencontre internationale “Les curés pour le Synode” à être missionnaires de synodalité également avec vous, leurs frères curés, une fois rentrés chez eux. »
Pape François, Lettre du Saint-Père aux Curés, 2 mai 2024
Derrière chaque bénédiction se cache une invitation, ou comme le dit le proverbe populaire, « il n’y a pas de repas gratuit ». Le mandat d’être un « missionnaire de la synodalité » et, en particulier, d’organiser des rencontres synodales pour les prêtres au Canada, n’était pas le souvenir que j’avais cherché à rapporter d’Italie. Mais une invitation du pape à être ce que je suis est une invitation difficile à refuser.
Tous disciples missionnaires
Du 28 avril au 2 mai, j’ai eu la chance de participer à la rencontre des prêtres de paroisse pour le Synode qui s’est tenue à Fraterna Domus à Sacrofano, dans la banlieue de Rome. Cette réunion rassemblait des curés, principalement diocésains, dont beaucoup ont un rôle important dans leur diocèse, venus du monde entier. Nous étions un peu moins de 200, tous envoyés en tant que délégués des conférences épiscopales. Nous étions trois prêtres dans la délégation canadienne : le père Daniel Ouellet, du diocèse de Sainte-Anne-de-la-Pocatière ; le père Fabio Desouza, du diocèse de Calgary ; et de moi-même, de Vancouver. Le père Gilles Routhier, de Québec, y était à titre d’expert théologique, tandis que le père Raymond Lafontaine, de Montréal, y participait en tant qu’animateur de table. Tous les cinq, nous sommes repartis avec une vision partagée : organiser quelque chose pour les prêtres au Canada.
La suite reste à déterminer, mais l’élan pour partager ce que nous avons reçu est palpable. Ayant parcouru le chemin synodal, où l’unité n’existe que par la grâce, nous savons tous, grâce à cette expérience, que la synodalité mérite d’être vecu. La synodalité est ce que nous sommes, en tant qu’Église et en tant que disciples du Bon Pasteur synodal.
Qu’est-ce qui s’est passé ?
Ce qui s’est passé, c’est que les prêtres se sont rassemblés et ont discerné. Le processus s’appelle les « conversations dans l’Esprit ». Il implique une préparation préalable, la présence d’un groupe de diverses personnes qui vivent ensemble la prière, l’écoute, la prise de parole et la recherche d’un consensus. Les questions portaient sur la mission de l’Église et sur la synodalité vivante. Que signifie la synodalité ? Eh bien, cela signifie trouver des moyens d’être humble, inclusif et animé par l’Esprit dans la prise de décision. Cela dit, ce que j’ai vraiment appris, c’est que la synodalité ne consiste pas à décider, mais à discerner. Si le discernement est honnête, respectueux, et qu’on lui donne le temps et l’espace nécessaires, c’est l’Esprit Saint qui, en fin de compte, prendra toutes les décisions.
Se laisser surprendre
Qu’est-ce qui vous a surpris ? C’est la question que m’a posée au cours du déjeuner, le deuxième jour, Sœur Nathalie Becquart, sous-secrétaire de la Secrétairerie du Synode et l’une des organisatrices. Maintenant que l’événement est terminé, je pourrais répondre « beaucoup de choses ». La première est de me rendre compte que tous mes héros synodaux, y compris Soeur Nathalie, sont aussi humains que moi. Ils apprennent à animer un chemin synodal pour l’Église. Personne ne prétend, en fait, avoir tout compris. Telle est la leçon et la grâce de la synodalité.
Un exemple de l’apprentissage qui a eu lieu concerne la disposition des tables. Au début de la réunion, des tables de douze ont été disposées en longues formes rectangulaires. Le premier jour, à midi, toutes les tables ont été réorganisées en carrés. Nous voulions nous entendre !
Dans mon groupe, j’étais le seul « américain ». C’est-à-dire le seul à être originaire d’Amérique du Nord ou d’Amérique du Sud. Le continent le plus représenté était l’Afrique. L’Europe et le Moyen-Orient étaient également bien présents. Au début du partage, il y avait une tendance naturelle à formuler les idées d’une manière douce et facile à accepter. Le troisième jour, comme l’a fait remarquer l’un des membres de mon groupe, nous sommes devenus plus honnêtes les uns avec les autres. La confiance s’est installée et un partage constructif a eu lieu.
Écouter d’abord
Dans le monde que je connais et dans lequel je vis, nous sommes nombreux à penser que nous méritons des réponses, et nous les voulons tout de suite. La connaissance est un pouvoir. Par manque de pouvoir, nous interrogeons les autres. Mais pour les chrétiens, les questions ont un autre but. Ce n’est qu’en renonçant à mon droit de savoir que j’ose poser la bonne question, celle qui m’aide à comprendre.
Au-delà de l’appel à partager cette expérience, c’est le lien entre synodalité et humilité que je retiens de cet événement. Comme tout le monde, j’ai des idées et des projets, des espoirs et des rêves. Cependant, ce qui compte plus que ce que je veux, c’est que je sois là, que j’appartienne à la communauté et que j’aie la grâce de discerner.
En tant que croyants, nous sommes tous des missionnaires de la synodalité. Envoyés pour partager la bonne nouvelle de l’appartenance à la famille de Dieu : sur le chemin et en conversation, c’est là que nous voulons être le plus. La synodalité commence par la compréhension de ce que nous sommes. Et une fois que nous l’avons compris, l’invitation devient difficile à refuser.
Pierre Ducharme, o.f.m., est Vicaire provincial et animateur de l’évangélisation pour la Province Saint-Esprit du Canada, ainsi que cure de la Paroisse Saint Joseph the Worker à Richmond, en Colombie-Britannique