Aldin Francis Canobas, OFM

Lorsque j’ai visité Banaue aux Philippines, j’ai été touché par les simples huttes nipa du peuple Ifugao. Ces huttes sont faites de bois et de feuilles, et pourtant elles sont solides et pleines de vie. Les familles y mangent, s’y reposent et partagent leurs joies quotidiennes. Ce qui m’a le plus surpris fut le tabernacle dans l’église paroissiale : il avait la forme d’une hutte nipa. Voir l’Eucharistie dans cette humble cabane m’a rappelé cette vérité : Jésus-Christ a choisi de faire sa demeure parmi nous. Comme le dit l’Évangile de Jean : « Le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » (Jn 1,14). Le mot original pour « habiter » signifie « dresser sa tente ». Tout comme Dieu demeurait jadis dans la Tente de la Rencontre avec son peuple, maintenant il vit dans notre vie humaine.
Ce mystère est aussi notre vocation. Saint Paul enseigne : « Car si nous sommes déjà devenus un seul être avec lui par une mort semblable à la sienne, nous le serons aussi par une résurrection semblable » (Rm 6,5). Dans le baptême, nous mourons avec le Christ et nous ressuscitons avec lui dans une vie nouvelle. Mais cela ne concerne pas seulement le passé. Chaque jour, quand nous disons non à l’égoïsme ou à l’orgueil, nous partageons sa mort. Chaque fois que nous vivons une perte, une douleur ou un deuil, nous marchons avec lui sur le chemin de la Croix.
Jésus lui-même a connu ces expériences. Dans sa Passion, il a crié sa colère, il a prié pour échapper à la souffrance, il a ressenti la tristesse et, finalement, il a remis son esprit au Père. Mais aucun de ces moments ne s’est achevé dans le désespoir. Dans la Résurrection, sa colère est devenue paix, sa tristesse est devenue joie, son abandon est devenu gloire.
Saint François a suivi le même chemin. Quand son père l’a rejeté, François a mis sa confiance en Dieu. Lorsqu’il est tombé malade et qu’il est devenu aveugle, il a continué à chanter le Cantique des créatures, louant Dieu pour tout. Quand il a reçu les stigmates, il a porté dans son corps la souffrance du Christ. À sa mort, François s’est couché à même le sol, bénissant ses frères et accueillant « Sœur Mort » dans la paix. Il nous a montré que la mort n’est pas une ennemie, mais une porte vers l’amour du Père.
Cela est vrai aussi pour nous. La Résurrection ne concerne pas seulement la vie après la mort. Elle commence ici et maintenant. Chaque fois que nous pardonnons au lieu de rester en colère, chaque fois que nous faisons confiance à Dieu au lieu de vouloir tout contrôler, chaque fois que nous trouvons l’espérance au milieu de la tristesse, nous vivons déjà la Résurrection.
Le tabernacle en forme de hutte nipa à Banaue me rappelle que le Christ a choisi de vivre avec nous, dans les lieux petits et simples de nos vies. Il marche avec nous dans nos morts et nos résurrections. Un jour, Sœur Mort viendra aussi nous rendre visite. Mais si nous appartenons au Christ, elle n’est pas à craindre. Elle est la guide qui nous conduit chez nous, auprès de Dieu.
Ainsi, avec Saint François, nous pouvons prier dans la paix : « Loué sois-tu, mon Seigneur, pour notre sœur la Mort corporelle. »

Frère Aldin Francis Canobas, OFM, est frère franciscain et infirmier diplômé, spécialisé en psychiatrie, santé mentale et dépendances. Il rejoint les Franciscains en 2020 et fait sa première profession en 2022. Il poursuit une maîtrise en théologie au Newman Theological College et partage sa passion pour la musique, la guérison et la compassion comme expressions de la vie évangélique.