Ici est le volet Le Christ et la femme cananéenne de Juan de Flandes, surnom d’un peintre de la fin du 15ᵉ et du début du 16ᵉ siècle appartenant au courant de l’art hispano-flamand. Ce tableau de quarante-sept petits volets d’Isabelle la Catholique a été exécuté à l’époque où l’artiste était au service de la Reine. Environ vingt-sept de ces volets survivent dont Le Christ et la femme cananéenne.
Le peintre a placé Jésus dans la partie la plus lumineuse de sa toile, à droite. Agenouillée devant lui, la cananéenne le supplie. A gauche, le groupe des disciples : ceux-ci sont vêtus de simples manteaux, comme Jésus lui-même, selon l’habitude des peintres de cette époque. En opposition, la femme et un homme portant le turban, tout à gauche, sont vêtus comme on représentait à l’époque les habitants du moyen orient turc : Jésus est en pays étranger, voire hostile; les regards que les disciples portent sur l’homme portant le turban le soulignent. Derrière Jésus, Pierre semble s’adresser à lui, écho des réclamations des disciples : « Renvoie-la, car elle nous poursuit de ses cris ! »
Cet Évangile de la femme cananéenne est intéressant, n’est-ce pas ? Il s’agit d’avoir l’humilité de demander, même quand les conditions ne sont pas bonnes et ne jouent pas en notre faveur. La Cananéenne est originaire de la région de Tyr et de Sidon. Le Liban actuel… et à l’époque de Jésus, cette région avait une religion et une culture qui étaient complètement étrangères à la foi et à la culture juives. Ils étaient vus par le peuple d’Israël comme des marginaux… des païens… et vraiment, ils étaient traités comme des chiens …
Mon premier point est que d’une certaine façon, chacun de nous est la Cananéenne … au moins dans certaines situations, à des moments donnés de nos vies. Que ce soit à cause du lieu d’où nous venons, en raison de nos antécédents familiaux, à cause de notre accent, à cause d’une certaine forme de « marginalité »… nous avons peut-être été dans une situation où nous avons été mis au rebut, rejetés, moqués ou simplement considérés comme moins qu’humains.
Mais le deuxième point que je voudrais faire valoir au sujet de cet Évangile est vraiment lié à la vocation du disciple, et à la mission franciscaine qui est la nôtre : comme des évangélisateurs et comme témoins évangéliques dans le monde! Jésus fait preuve d’une grande pédagogie. Il « forme ses disciples ». La réalité est la suivante : les Cananéens sont rejetés, non respectés et mal vus par le peuple d’Israël. Ils ne sont pas considérés comme dignes d’attention, et l’attitude acceptée est tout simplement de les ignorer. Jésus le sait. Et il sait pourquoi les jugements sont si sévères à leur égard, et le reconnaît, mais pousse la situation plus loin. « Femme, grande est ta foi », dit-il… C’est la foi qui compte. Si nous nous en tenons à leur réputation… nous risquons de ne pas voir leur cœur. Et quand on ne considère pas le cœur, on passe à côté de ce qui est essentiel…
Évangéliser, c’est d’abord et avant tout marcher à la suite du Christ, et ici Jésus nous montre qu’il n’y a pas de frontières à l’amour de Dieu. C’est une question de Fraternité universelle, de Sororité universelle… de Fraternité sans frontières… C’est ce que nous avons à proclamer!
Cette pauvre mère cananéenne, étrangère à la foi d’Israël, nous est tenue comme un exemple de foi, de courage et d’amour.