À la fin de l’année 2019, j’apprenais que dans la ville de Wuhan en Chine apparaissait une nouvelle forme de coronavirus, nommée Covid-19. À ce moment là, qui aurait pu imaginer l’impact que cela aurait pu avoir sur la vie de 7,7 milliards d’habitants sur la terre dans les semaines à venir? Comme une trainée de poudre, le virus s’est répandu à travers la planète. En mars 2020, aucun continent n’était épargné. Le virus se déplaçait rapidement : Corée du sud, Iran, Italie, France. Partout, des mesures furent prises afin de limiter la propagation du virus.
Ici à Montréal, le samedi 14 mars 2020, nous recevions un avis du Gouvernement du Québec : «Le gouvernement de François Legault a décrété samedi l’état d’urgence sanitaire, une mesure temporaire qui donne des pouvoirs exceptionnels aux autorités sanitaires pour endiguer la progression du virus. Le Premier Ministre invite aussi les Québécois de 70 ans et plus à rester à la maison ‘pour un certain nombre de semaines’. Je veux envoyer un message aux personnes âgées, les aîné(e)s, qui courent un risque supérieur.»
En lisant ce décret ce jour-là, je réalisais tout-à-coup que, vu mon âge, je rentrais automatiquement dans la catégorie des gens les plus à risques de Montréal. Je devais donc me confiner, rester à la maison, ‘m’encabaner’ (excusez l’expression) pour quelques semaines ou quelques mois.
Mais mon confinement volontaire n’a pas été trop catastrophique. Au début, je regrettais de ne pouvoir continuer ma présence comme Assistant spirituel auprès de fraternités franciscaines séculières de la région. J’ai regretté aussi le fait de ne pas pouvoir poursuivre mon ministère occasionnel à la Pénitencerie du couvent.
Je me souviens que le dimanche 15 mars, lendemain de la promulgation du décret de confinement, nous avions la possibilité de célébrer l’Eucharistie, mais sans la présence habituelle des fidèles de notre chapelle. En entrant dans l’église et en voyant la nef complètement vide, j’ai éprouvé une certaine tristesse, un chagrin causé sans doute par l’absence de nos frères et sœurs. Cette nef complètement dépouillée évoquait en moi l’image d’un tombeau vide. Quelques instants plus tard, je prenais conscience tout-à-coup que ce tombeau vide se trouvait dans notre chapelle dédiée à la Résurrection! Dans le contexte de pandémie, ces deux images du tombeau et de la Résurrection symbolisent la confrontation entre la mort et la vie.
La petite œuvre de Marc Chagall, La Résurrection de Lazare, qui accompagne cet article est datée de 1910, et se rattache directement à ses souvenirs d’icônes. Chagall prit une enluminure byzantine du 11e siècle pour model iconographique. Il a terminé cette œuvre en tant qu’étudiant en art à Saint-Pétersbourg, peu de temps avant de s’installer à Paris. Bien que l’auréole du personnage désigne son statut de saint chrétien, Chagall rappelle au spectateur que le récit concerne un Juif, comme c’est suggéré par les triangles imbriqués de l’Étoile de David et les mains tenues dans le signe juif de la bénédiction sacerdotale. Ces emblèmes sont inscrits sur la tombe de Lazare à partir de laquelle il vient de sortir vivant. Souhaitons que – comme Lazare sur ce tableau – nous puissions émerger de cette épreuve très bientôt pour poursuivre, chacun(e) à sa façon, notre mission chrétienne et franciscaine.
Jésus et la mort
par Cardinal Danneels
Seigneur Jésus,
comme au tombeau de Lazare,
tu es triste
quand les gens doivent mourir.
Mais bien plus grande est la tristesse
quand nous nous engageons
sur les sentiers du péché,
cette autre mort.
Roule donc la pierre de devant ce tombeau,
enlève nos bandelettes,
écarte le suaire de notre tête.
Laisse-nous aller, nous aussi.
Alors, au dernier jour, nous entendrons ta voix
nous sortirons de nos tombeaux et nous irons à ta rencontre.
Parce que, comme des oiseaux, nous aurons échappé
au filet de l’oiseleur :
la deuxième mort.